Côte d’Ivoire : la crise énergétique menace la filière cacao

À peine remise des effets néfastes de la crise économique et des restrictions imposées par les multinationales, la filière cacao doit à nouveau faire face à un énième défi, les délestages, qui frappent depuis début mai l’ensemble des entreprises et ménages ivoiriens.

Une situation qui semble ubuesque au regard du passé récent du pays : la Côte d’Ivoire, qui connaît une forte embellie économique depuis une décennie, a exporté en 2020 11 % de sa production d’électricité vers six pays voisins – Ghana, Togo, Bénin, Burkina, Mali et Liberia –, selon le ministère de l’Énergie. Mais en raison du bas niveau de l’eau des barrages, dû à la faible pluviométrie et aux changements climatiques qui limitent la production hydroélectrique, ainsi qu’une insuffisance de l’offre de gaz naturel, qui limite la production thermique, c’est toute l’infrastructure énergétique qui est désormais sous pression.

Résultat, la vague de délestage qui touche la Côte d’ivoire menace l’ensemble de la filière cacao- premier poste d’exportations du pays-, en particulier les broyeurs de cacao qui transforment les fèves. L’État ivoirien s’était pourtant engagé cette année à broyer 50% de sa production. Cet objectif est désormais quasiment irréalisable, de l’avis d’un dirigeant d’une société de broyage de la place : «Cette situation est vraiment regrettable à un moment où la production atteint un niveau louable. Les pertes occasionnées par la réduction de nos capacités de broyage s’annoncent élevées », se désole notre interlocuteur. Pis, nombre de sociétés de broyage accuseront des retards de livraisons mais aussi des manques à gagner conséquents pour celles d’entre elles qui exportent les fèves de cacao traitées. Certaines d’entre elles ont d’ores et déjà fait le choix de réduire voire, renoncer à la production de beurre de cacao.

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Pour le seul mois de mai, la baisse de l’activité de broyage devrait être de 40% environ, estime le Conseil Café Cacao (CCC). En temps normal, 45000 à 50000 tonnes de cacao sont broyées chaque mois . Une contraction qui touchera aussi par contrecoup l’État puisque ce sera autant de moins de taxes à l’export à percevoir.  La compagnie nationale d’électricité ivoirienne, la CIE, pronostique toutefois un retour à  la normale au mois de juillet, une période qui coïncide avec la saison des pluies. Affaire à suivre…